Elle n’était pas peu fière, la p’tite Chouanne – le film s’était déjà déroulé dans sa tête. Elle inviterait ses amies façon Wisteria Lane, comme à leur habitude elles parleraient de tout et de rien, d’elles, des garçons, des filles, des autres, de la vie. Et puis viendrait le moment où ça s’imposerait, forcément, naturellement ; l’instant où elle placerait l’histoire avec la mieux feinte des désinvoltures :
— Tiens, au fait je me suis abonnée aux flux de Jóhanna Sigurðardóttir.
Elle savait déjà où chacune serait assise, ce qu’il y aurait dans les tasses, la couleur du gâteau. Elle avait rapidement prévu sa robe et sa coiffure, elle… elle savourait déjà les regards en coin. Oui, c’est ça, les silencieux grincements de dents de Nathanaëlle, le léger palissement de Sandra, le bref arrêt respiratoire d'Eléonore.
Elle jouissait de sa gloire.
Ce n’est qu’en recevant le premier bulletin qu’elle réalisa que tout serait rédigé en islandais.